Après une carrière de deux décennies qui l'a vu représenter certains des plus grands clubs du monde, Emmanuel Adebayor marquera la fin de sa carrière de joueur par un jubilé au Togo dimanche.

Des noms légendaires du football africain et européen, comme Samuel Eto'o, Jay-Jay Okocha et les frères Touré, seront présents à Lomé pour un week-end de célébrations et d'hommage en l'honneur d'un homme qui a aidé son pays à se qualifier pour sa première, et à ce jour unique, Coupe du monde de la FIFA en 2006.

Adebayor veut maintenant aider la prochaine génération de son pays à accomplir davantage, motivé à la fois par sa propre enfance et par l'horrible attaque à l'arme à feu contre l'équipe du Togo en 2010.

« C'est maintenant que je réalise qu'aider un être humain est encore mieux que de marquer un beau but en Premier League ou en Ligue des champions », a déclaré le joueur de 40 ans.

Dans un entretien exclusif avec BBC Sport Africa, l'attaquant revient sur les moments clés de sa carrière.

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Le football comme source d'énergie

Pendant les premières années de sa vie, les parents d'Adebayor ont été perturbés par son incapacité à marcher, alors qu'il était par ailleurs en bonne santé.

Alors qu'il ne marchait encore qu'à quatre pattes à l'âge de cinq ans, sa famille s'est adressée à des chefs spirituels du Ghana voisin, qui ont insisté sur le fait que le problème pouvait être résolu par une prière intense.

Un dimanche, un ballon de football a rebondi dans l'église où les pasteurs priaient pour le jeune Adebayor.

« Dès que j'ai vu le ballon, j'ai commencé à courir vers lui », raconte-t-il.

C'était un moment de délivrance, et tout le monde criait « Il marche, il marche ! ». Tout le monde était si heureux et chaque fois que ma mère racontait cette histoire, elle pleurait.

Une relation indélébile avec ce sport venait de naître.

Kanu, un exemple à suivre à Highbury

Après avoir été arraché au Togo par le club français de Metz, Adebayor a passé près de trois saisons à Monaco avant de rejoindre Arsenal en janvier 2006.

Près de 20 ans plus tard, il considère ce transfert comme le deuxième moment le plus important de sa carrière.

« Mon idole était Nwankwo Kanu, alors signer pour Arsenal, porter son maillot numéro 25 et utiliser le même casier que lui, c'est pour moi un énorme accomplissement », a-t-il déclaré.

« Aujourd'hui, il est mon grand frère, mon meilleur ami et il me conseille si je fais bien ou mal. »

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La forme d'Adebayor avec les Gunners en 2008 a joué un rôle majeur dans le fait qu'il est devenu le premier - et le seul - Togolais à être couronné footballeur africain de l'année.

« En 2008, j'étais injouable », a-t-il déclaré.

« C'est quelque chose que je n'oublierai jamais et que je ne considérerai jamais comme acquis ».

Pourtant, ses relations avec le club du nord de Londres se sont détériorées après qu'il eut rejoint Manchester City et couru sur toute la longueur du terrain pour célébrer un but devant les supporters d'Arsenal en 2009.

Adebayor s'est excusé par la suite, déclarant que « l'émotion l'avait envahi ». Il a ensuite été condamné à une amende de 25 000 livres sterling (environ 19 670 000 f cfa) et à une suspension de deux matches.

Un morceau d'histoire en Coupe du monde

La même année que son transfert à Highbury, le Togo a fait sa seule apparition en Coupe du monde, devenant ainsi la plus petite nation africaine à disputer la phase finale.

Adebayor a inscrit un nombre inégalé de 11 buts lors des qualifications, les Eperviers terminant devant le Sénégal, quart de finaliste de la Coupe du monde 2002.

« Aujourd'hui encore, nous, les acteurs, essayons de nous expliquer, mais nous n'y arrivons pas », a-t-il déclaré.

« Nous ne savons vraiment pas ce qui s'est passé au cours de ces années et ce qui nous a donné la confiance nécessaire pour être aussi forts que nous l'étions. C'était incroyable. »

Le sélectionneur nigérian Stephen Keshi a mené le Togo vers la qualification mais il a été remplacé avant la Coupe du monde après une mauvaise prestation durant la Coupe d'Afrique des Nations 2006, marquée par une spectaculaire dispute avec Adebayor.

La campagne du Togo en Allemagne est à oublier, l'équipe perdant tous ses matches et menaçant de boycotter la compétition, mais le simple fait d'atteindre le tournoi est un exploit.

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Traumatisme lié à un attentat terroriste

Après avoir manqué la Coupe des Nations 2008, le retour à l'édition 2010 aurait dû être un rêve.

Au lieu de cela, c'est un cauchemar inimaginable qui s'est déroulé.

Le 8 janvier 2010, le bus de l'équipe togolaise a été attaqué par des rebelles séparatistes alors qu'il traversait l'enclave de Cabinda, dans le pays hôte, l'Angola.

La délégation togolaise a été la cible de tirs pendant plus d'une demi-heure, faisant deux morts et laissant une foule de souvenirs indésirables à ceux qui ont survécu.

« Parfois, vous pouvez être dans votre cinéma à la maison en train de regarder un film, ou quelque part quand quelqu'un laisse tomber quelque chose - qui a un son similaire à celui d'un coup de feu - et vous vous souvenez de ce qui s'est passé en 2010 », a déclaré M. Adebayor.

« Je suis un grand fan de films d'action. Je les regarde toujours, mais c'est difficile. »

« Parfois, vous voyez des gens tirer sur un bus et cela vous ramène directement en arrière. »

Le Real et Sherwood au sommet de la gloire

Malgré des passages en Europe et un bref séjour au Paraguay, le meilleur buteur du Togo n'a remporté qu'un seul trophée : la Copa del Rey avec le Real Madrid en 2011.

Ce triomphe a été obtenu par une équipe de stars comprenant Iker Casillas, Sergio Ramos et Cristiano Ronaldo, qui a marqué le but de la victoire contre le FC Barcelone de Pep Guardiola.

« Il existe une vidéo de moi dansant dans les vestiaires avec Pepe et Sergio », a déclaré Adebayor.

« Certains joueurs qui n'ont pas la moitié de mon talent ont gagné une Coupe du monde, mais mon objectif est de ne pas avoir de regrets. »

« Je suis heureux de ma carrière. Si on me demandait de recommencer, je le ferais ».

Adebayor a joué sous les ordres d'Arsène Wenger, de José Mourinho et de Didier Deschamps, entre autres, mais il affirme que c'est un manager à la carrière des plus brèves qui a su tirer le meilleur de lui.

Andre Villas-Boas avait mis au frigo Adebayor à Tottenham, mais Tim Sherwood l'a ramené dans le giron de l'équipe lorsqu'il en a pris la direction en décembre 2013.

Lors de la première réunion avec l'équipe première, Sherwood a dit : « Mon talisman sera Emmanuel Adebayor, tout passera par Adebayor. Le tireur de penalty, c'est Adebayor », se souvient l'attaquant.

Pour sa première titularisation en club depuis sept mois, il a marqué contre West Ham lors du premier match de Sherwood, entamant ainsi une série de 11 buts en 14 matches.

« Après le match, nous avons eu un appel téléphonique d'une heure au cours duquel il m'a dit à quel point j'étais brillant, qu'il comptait sur moi et que, quoi qu'il arrive, je devais savoir qu'il me soutenait à 100 % », raconte-t-il.

« Lorsque votre patron vous dit cela, le reste est facile. Aujourd'hui encore, nous discutons. C'est magnifique ».

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Son influence au Togo

Depuis qu'il a arrêté le football, Adebayor consacre la majeure partie de son temps à la fondation SEA (Sheyi Emmanuel Adebayor) qu'il a créée il y a un peu plus de dix ans.

Il s'est inspiré de sa propre expérience, lorsqu'il a dû abandonner l'école parce que ses parents ne pouvaient pas payer les frais de scolarité (environ 19 600 cfa), et de l'attentat en Angola, qui lui a fait comprendre que « tout peut s'arrêter à n'importe quel moment ».

Avec les Nations unies et l'Agence française de développement parmi ses partenaires, la fondation parraine des centaines d'enfants pour qu'ils s'améliorent dans des domaines allant des STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques) à l'entrepreneuriat agricole.

« Lorsque vous avez un impact sur la vie de quelqu'un, ce n'est pas seulement la vie d'une personne, c'est la vie d'une génération », a déclaré M. Adebayor.

« Cette personne parlera à son enfant, son enfant parlera à son petit-enfant et ainsi de suite. Pour moi, c'est sans limite ».

Il existe même un projet d'université Emmanuel Adebayor au Togo, car cet ancien joueur turbulent souhaite influencer la société de son pays de la même manière qu'il l'a fait pour le football.

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